LPM, économie de guerre : quelles mutations pour l’industrie de défense ?
Les industriels sont unanimes : la guerre en Ukraine a rebattu les cartes des défis industriels. Cela s’est notamment traduit par la nécessité d’avoir un dialogue soutenu entre les industriels et le ministère des Armées. « L’économie de guerre, c’est un état d’esprit, la capacité à se mettre autour de la table pour voir comment faire mieux, plus vite, dans un dialogue permanent entre client et fournisseur », explique le PDG de Naval Group, Pierre-Eric Pommellet. Pour produire « plus, plus vite, moins cher et être plus souverain », comme l’énonce le directeur général de Nexter, Nicolas Chamussy, l’échange avec les autorités étatiques est indispensable. « Il a fallu être proactif et coordonnés », explique-t-il.
Le PDG de MBDA Eric Béranger abonde : « le renforcement du dialogue entre la DGA, les états-majors et les industriels a été très important ». Le constat est partagé et approuvé par la Direction générale de l’armement (DGA). Ainsi, le chef du service des affaires industrielles et de l’intelligence économique de la DGA, Alexandre Lahousse indique que « la surface d’échange avec l’industrie a beaucoup augmenté depuis un an ».
Le défi de la chaîne d’approvisionnement
Le modèle « temps de paix » a dû être requestionné pour pouvoir faire face, avec la difficulté de devoir s’affranchir autant que faire se peut des dépendances étrangères. « Nous travaillons sur le tissu industriel », indique Alexandre Lahousse, que ce soit dans une logique de relocalisation, à l’image de la filière poudre, pour soutenir des entreprises françaises à se développer, mais aussi pour diversifier les sources d’approvisionnements des matières sourcées à l’étranger.
Pour être capable de fournir en temps et en heure les équipements, les industriels ont dû repositionner leurs besoins, indique le patron de Naval Group, et prendre en compte les forces et les faiblesses de la chaîne d’approvisionnement. Si les grands groupes n’ont pas de difficultés à accélérer, c’est l’écosystème de toute la chaîne de sous-traitance qui doit être accompagné, « car il suffit de quelques maillons faibles » pour remettre en cause la dynamique, selon Alexandre Lahousse.
Une guerre économique
Au-delà du seul défi technique, se pose la question du recrutement et de l’attractivité des métiers de la filière. A cet égard, la LPM a été l’occasion « de ramener dans le débat public les questions de défense », indique Pierre-Eric Pommellet, avec la perspective de poursuivre les efforts de recrutement. Car en temps d’économie de guerre, comme l’explique Nicolas Chamussy, les industriels font également face à une « guerre économique » et doivent trouver un équilibre entre les actions menées pour répondre au besoin de solidarité de l’État tout en poursuivant leur développement économique dans un environnement hautement concurrentiel.